Les Systèmes Urbains Cognitifs

Les « Systèmes Urbains Cognitifs » constituent un programme de recherche que nous avons initié en 2008 avec la réalisation d’une thèse (Université de Grenoble) et l’étude de grands projets urbains situés à Buenos Aires (Distrito tecnológico et Distrito de diseño), Barcelone (22@Barcelona) et Grenoble (GIANT/Presqu’île). Nous prévoyons en 2015 la publication d’un ouvrage collectif sur les Systèmes Urbains Cognitifs.\r\n\r\nLes Systèmes Urbains Cognitifs (SUC) sont des espaces qui émergent au cœur des villes depuis le début des années 2000. Ces espaces cherchent à attirer les talents et les activités innovantes, tout en jouant un rôle actif dans les processus de production d’innovations. Loin de constituer des villes dans la ville ou des zones interdites dédiées à la créativité, les SUC tentent de créer les conditions d’une innovation ouverte et encastrée dans un tissu économique, urbain et socioculturel diversifié. Les SUC ne sont pas positionnés sur un secteur d’activité ou un domaine scientifique précis. Leur spécificité réside dans leur capacité à organiser l’hybridation entre des sciences, des filières, des cultures et des savoir-faire hétérogènes. Au sein des Systèmes Urbains Cognitifs, l’espace architectural et urbain n’est pas neutre, mais entièrement intégré aux process d’innovations. Cette dimension spatiale joue une fonction essentielle pour stimuler les interactions entre des acteurs formels (laboratoires de recherche, universités, entreprises) et informels de l’innovation (artistes, habitants, utilisateurs des innovations), mais aussi expérimenter les innovations dans l’espace public des villes. De cette définition générique, notre recherche se construit autour de trois axes :\r\n\r\n1. La mise en perspective historique des Systèmes Urbains Cognitifs. Depuis l’Antiquité, les villes ont créé des espaces propices à la créativité et l’innovation, à destination des artistes, chercheurs, savants et poètes du monde entier. La conception de ces espaces était alors largement inspirée des monastères et de l’utopie insulaire qui induisaient un isolement des penseurs du monde extérieur et des tourments de la vie sociale et urbaine. Cette philosophie va inspirer la construction des Universités au XIIème siècle, le développement des ateliers d’artistes à la Renaissance et des laboratoires de recherche au XIXème siècle. Au milieu et à la fin du XXème siècle, la création des campus universitaires, des technopôles et des premiers clusters constitue une version rénovée de cette pensée insulaire. Bien que souvent localisés en milieu urbain, ces différents espaces de savoirs se caractérisent par un développement séparé du tissu socioculturel et économique des villes. Ils restent fortement tributaires d’une conception selon laquelle les processus de création et d’innovation sont l’apanage d’une élite de chercheurs et de créatifs, qui nécessitent des «lieux de retraite et des abris protecteurs».\r\n\r\n2. Les Systèmes Urbains Cognitifs de type 1. Ces SUC sont apparus au début des années 2000, à la suite du projet 22@Barcelona. Depuis, une quarantaine de projets de districts technologiques, de quartiers des sciences, de la création ou de l’innovation ont émergé à travers le monde. Ces SUC font suite à des stratégies de planification et de requalification de sites urbains compris entre 100 et 300 hectares. Ils proposent un modèle conjuguant qualité de vie, créativité et innovation technologique, densité et mixité fonctionnelle et sociale. Ces SUC sont bâtis sur un fort déterminisme technologique. Ils reposent sur l’idée selon laquelle les innovations technologiques seraient aptes à stimuler par elles-mêmes le développement socio- économique, urbain et durable des villes. Or ce déterminisme technologique engendre une série de problématiques socio-économiques importantes.\r\n\r\n3. Les Systèmes Urbains Cognitifs de type 2. Ces SUC se développent actuellement sous la forme des Tiers Lieux. Sont concernés les espaces de coworking, les Fab Labs, les Living Labs et autres Media Labs. Au-delà des définitions spécifiques de ces différents espaces, la spécificité des SUC de type 2 est de ne plus se focaliser sur la question de la diffusion des innovations, mais d’interroger le détournement et la co-production des innovations par les habitants et les utilisateurs.